La faune est plus près que l’on pense. Colibri à gorge rubis photographié au travers de ma fenêtre!

Apprendre à photographier la faune

En collaboration avec Bertrand Duhamel, photographe animalier

Le Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin offre de magnifiques possibilités pour la photographie animalière, un loisir de plus en plus accessible grâce à l’évolution du matériel photographique et l’accès aux nombreuses ressources disponibles sur le sujet. C’est une passion qui se développe avec l’intérêt et si vous êtes prêt à y consacrer tout le temps nécessaire, nul doute que vous pourrez éventuellement réaliser de magnifiques clichés! 

Patience et persévérance

Lorsque vous admirez les portfolios de photographes animaliers, dites-vous que ces résultats sont le fruit de longues heures passées sur le terrain. Il faut sortir souvent et apprendre à accepter que ce soit la nature qui a le dernier mot… Bon nombre de sorties s’avèreront infructueuses alors que d’autres nous réserveront de belles surprises lorsqu’on s’y attend le moins!  

Connaissance du milieu et des sujets

La connaissance des comportements et des milieux de vie est un atout important pour pouvoir identifier la présence de nombreuses espèces animales. Je pense entre autres aux oiseaux que l’on ne voit pas nécessairement, mais que l’on peut identifier par leurs chants. Que ce soit sur le web ou à l’aide d’applications mobiles, il existe aujourd’hui une multitude d’outils qui peuvent nous renseigner sur les sujets qui nous intéressent.

Une bonne façon pour débuter est d’apprendre à connaitre son environnement immédiat, car la faune animale se trouve souvent plus près que l’on pense. Il m’est arrivé souvent de compter plus d’espèces d’oiseaux dans ma cour arrière que lors d’une marche de plusieurs kilomètres dans une réserve faunique!

Peu importe l’endroit fréquenté, l’approche sur le terrain doit se faire dans le respect, de façon silencieuse et en demeurant à distance. On arrive souvent à de meilleurs résultats en demeurant sur place et en laissant l’animal se rapprocher. Par exemple, si on a vu un oiseau à un endroit, il y a de fortes chances qu’il y revienne. On dit que la patience est la mère de toutes les vertus, ce qui est d’autant plus vrai en photographie animalière!

S’installer confortablement en attendant que les oiseaux aquatiques se rapprochent. 

Le matériel photo

Il existe aujourd’hui une grande variété d’appareils photos pour tous les budgets et pour combler tous les besoins. En photo animalière, il faut privilégier les objectifs qui peuvent nous donner de grandes longueurs focales, voir 300mm ou plus. Comme la vision de l’œil humain équivaut à une longueur focale d’environ 50mm, un objectif de 400mm produira un effet de rapprochement de 8x, soit l’équivalent d’une paire de jumelles standard.

Pour les débutants, les appareils de type « bridge » sont des « tout-en-un » peuvent s’avérer de bons choix, car ils comportent des objectifs intégrés de type « zoom » couvrant une large plage de longueurs focales allant du grand angulaire pour les paysages, jusqu’au super téléobjectif pour les sujets éloignés.  

Bien que ce type d’appareil ait l’avantage d’être léger et polyvalent, il produira généralement une qualité d’image inférieure aux appareils de type reflex équipés de capteurs plus performants et sur lesquels on peut monter un objectif adapté au sujet à photographier.

Pour les appareils de type reflex, il faut privilégier les boîtiers qui peuvent assurer un bon suivi au niveau de l’auto-focus et produire une cadence de déclenchement élevée pour la photographie de sujets en mouvement. La gamme de prix varie énormément pour ce genre d’appareil selon le type de capteur qu’ils utilisent, soient les APSC ou Full frame. On parle ici de quelques centaines jusqu’à plusieurs milliers de dollars pour les boîtiers professionnels.

Depuis quelques années, on observe une transition des appareils reflex vers une nouvelle technologie « sans miroir » qui offre des améliorations marquées au niveau de la performance et de la facilité de la prise de vue.

Comme plusieurs photographes font la transition vers ce type d’appareil, il est possible de retrouver à très bon prix sur le marché du matériel d’occasion, des kits complets d’appareils reflex standards avec objectifs qui feront très bien le travail pour celui qui débute en photo animalière.

Si on désire améliorer notre équipement et investir pour le long terme, on pourra privilégier l’achat d’objectifs de haute qualité. Les boîtiers évoluent constamment et sont appelés à être remplacés alors que de bons objectifs nous rendront service pendant plusieurs années tout en nous offrant une grande qualité d’image.  

Photos prises en 2007 avec un appareil de type reflex de 8 mégapixels.

apf4 copie

Exemple d’un kit complet trouvé sur Marketplace pour environ 600$. Un boîtier de 16 mégapixels qui peut très bien faire l’affaire pour un débutant.

La technique

Même avec le meilleur équipement au monde, il sera difficile d’obtenir de bons résultats si on ne maitrise pas les connaissances de base en photographie. Connaitre les paramètres de base et l’interrelation entre ces derniers est primordial pour apprendre à exposer correctement en fonction des sujets. Ouverture, vitesse d’obturation et sensibilité ISO constituent les trois paramètres de base en photographie. On appelle ça le triangle d’exposition ou triangle d’or.

C’était vrai dans les années 70 alors que j’apprenais la photo en me plongeant dans les bouquins d’Antoine Desilets et ça l’est encore aujourd’hui malgré toute l’évolution reliée à la technologie numérique. Il existe de nombreux tutos sur le web à ce sujet et aujourd’hui, il est encore plus facile d’expérimenter sur nos appareils, car les résultats sont visibles instantanément.

Les paramètres de base en photographie expliqués par le triangle d’exposition.

Pour la photo animalière, comme on doit travailler avec de grandes longueurs focales, une vitesse d’obturation élevée permettra d’éviter les flous de « bougé » de l’appareil et du sujet s’il est en mouvement.  Une règle facile à retenir est d’utiliser comme vitesse minimale, l’inverse de la longueur focale. Par exemple à 300mm, on devrait être minimalement à 1/300 de seconde pour éviter un flou de bougé. Comme certaines personnes ont plus de difficulté à stabiliser leur appareil à main levée, je recommande de faire des tests à différentes vitesses pour pouvoir établir sa limite. Pour certains, l’utilisation d’un pied (monopod) ou d’un trépied bien qu’un peu plus encombrant sur le terrain, pourront aider à stabiliser l’appareil.

Pour ma part, comme je photographie surtout les oiseaux et que j’utilise des longueurs focales variant de 300mm à 800mm, je travaille le plus souvent en mode semi-automatique Tv, donc priorité à la vitesse à 1/1000s ou plus et en auto-ISO, ou bien en mode priorité à l’ouverture Av, mais en assignant une vitesse minimale de 1/1000s et toujours en auto-ISO.

Pour ce qui est des fichiers, j’opte pour le raw au lieu du jpeg car en plus de conserver plus de détails, il permet plus de flexibilité lors du traitement d’image sur l’ordinateur. Cela demande un peu plus d’espace de stockage et un peu plus de travail, mais les résultats en valent la peine.

Finalement, comme chaque appareil comporte ses particularités, je recommande toujours fortement de lire son manuel d’utilisation pour pouvoir en tirer le maximum.

La lumière

L’éclairage joue un rôle important en photographie. Que ce soit pour la photo animalière ou pour les paysages, on obtiendra toujours de meilleurs résultats en photographiant pendant les premières ou les dernières heures de la journée, lorsque le soleil est moins haut dans le ciel. On appelle ces périodes « heures dorées », car elles produisent une lumière plus chaude et plus douce, sans compter que la faune est généralement plus active lors de ces périodes.

 L’heure dorée offre une lumière chaude et plus douce pour la photo animalière.   

Jouer avec la perspective et la profondeur

Apprendre à contrôler la profondeur de champ en utilisant l’ouverture maximale de l’objectif permettra au sujet de se détacher de l’arrière-plan et donner un effet 3d à la photo, un peu comme si vous y étiez. L’arrière-plan constitue également un élément important de la photo. Au moment de déclencher, assurez-vous que ce dernier ne présente pas un élément gênant qui pourrait interférer avec le sujet principal. Il suffit parfois juste de se décaler légèrement avoir un arrière-plan plus harmonieux qui enveloppera notre sujet principal.

Une autre technique pour rendre une image plus forte est de changer notre perspective en se plaçant au niveau de l’animal. Aujourd’hui, plusieurs appareils sont dotés d’écrans pivotants nous permettent de descendre le boîtier au niveau du sol tout en gardant un œil sur le sujet. On aura donc pas besoin de se coucher par terre comme je l’ai fait pour cette photo d’une tortue serpentine.

Pour réussir à s’approcher d’animaux plus farouches, l’utilisation d’un matériel de camouflage pourra s’avérer nécessaire. Je ne suis pas un expert dans le domaine, mais je sais qu’il existe toute une panoplie d’articles et de vêtements pour nous permettre de nous fondre dans le décor.   

Pour cette photo d’abeille dans les verges d’or, j’ai porté une attention particulière à l’arrière-plan pour créer un effet chaleureux et enveloppant. 

Couché par terre pour une photo d’un bébé tortue serpentine. Le résultat en valait la peine!

Quelques photos animalières prises au ras du sol.

La composition

Bien qu’il ne soit pas toujours possible de cadrer le sujet de façon optimale dans le feu de l’action, il faut attacher une grande importance à cet aspect, quitte à le faire lors du traitement à l’ordinateur.  Pour ce faire, on peut choisir volontairement de cadrer un peu plus large au moment de prendre la photo et ainsi se garder de l’espace et de la flexibilité au moment du traitement de l’image. Un bon cadrage attirera le regard vers le sujet et permettra de bien le mettre en valeur dans son environnement. Il existe de nombreuses publications sur le sujet, notamment au sujet de la règle des tiers (points de force) et de l’équilibre des masses.

Il est important de cadrer en tenant compte du regard et du mouvement du sujet, ce qui rendra la scène plus naturelle et harmonieuse.

Cadrage en utilisant un des points de force selon la règle des tiers et en laissant un dégagement en direction du regard de l’oiseau.

apf10

Même principe que la photo précédente, mais cette fois, en laissant un dégagement du côté du déplacement de l’oiseau.

Pour ce qui est du traitement d’image, je n’élaborerai pas sur le sujet, car c’est tout un monde en soi… Disons qu’il existe une multitude d’outils pour nous aider « développer » et optimiser nos photos et pour ma part, j’utilise principalement Lightroom et Photoshop, mais aussi en complément, des logiciels comme DX0 et Topaz qui font du très bon travail au niveau du traitement des fichiers raw et de la réduction du bruit numérique.  

En conclusion, la photographie animalière présente de nombreux défis et il n’existe pas de méthode universelle, car les sujets sont très variés. Il faut bien se préparer, bien se documenter, faire preuve d’anticipation, et tout cela avec respect et éthique envers la faune.

Sur le terrain, Il faut toujours garder en tête qu’après tout, c’est nous qui sommes les intrus…  Patience et persévérance… le sujet finira par venir à vous!

Bonnes photos!

À PROPOS DE BERTRAND DUHAMEL

De façon autodidacte, Bertrand s’intéresse à la photographie depuis le début de son adolescence. Il aime présenter des photos empreintes de sensibilité, qui mettent ses sujets en valeur. Bien qu’il ne soit pas photographe de métier, ses photos ont attiré au fil du temps l’attention de plusieurs institutions locales, pour lesquelles il a accepté de collaborer. Depuis quelques années, le CINLB tout comme le Zoo de Granby font partie de ces organismes pour lesquels il contribue activement. Étant natif de Granby, c’est pour lui un honneur que de pouvoir mettre en valeur par ses photos, ces grandes institutions d’ici.