Quand l’esprit veille… aux atterrissages

Par Michel Aubé, passionné de Biodiversité

Le grand nichoir est installé depuis la mi-mars. Haut de 35 centimètres et percé d’une entrée large de 7,5 centimètres, il est placé à dix mètres de hauteur et orienté entre le sud et l’est, pour un ensoleillement optimal. Les spécifications requises pour un hôte de marque! Or voilà qu’un Étourneau sansonnet se pointe et s’intronise maître des lieux. Pour le pirate des nids de pics, cette habitation est un véritable luxe. Mais à peine entré, il est terrassé par une ombre qui a foncé à l’intérieur telle une flèche. Les piaillements de l’étourneau résonnent dans un froufrou de plumes, et l’indésirable resquilleur échappe de justesse aux serres puissantes, fuyant sans demander son reste.  

Un couple de Crécerelle d’Amérique avait déjà réquisitionné le nichoir et n’entendait pas le laisser squatter par l’intrus. Ce rapace diurne, de la famille des Falconidae, est le plus petit du continent américain, et le plus répandu sur le territoire, de l’Alaska à la Terre de feu. Il en est  également le plus élégant, aux couleurs d’oiseau exotique. Son dos fauve est rayé de traits sombres, et une bande noire termine sa queue rousse. Chez le mâle, les ailes bleu ardoise, ont une bordure d’ébène. La bande au bout de la queue est plus large que chez la femelle, et lisérée de blanc. Chez les deux sexes, le dessus de la tête est roux, couronné de bleu acier. La gorge est blanche et deux favoris noirs, encadrant une joue immaculée, ornent chaque côté de la tête.

Outre sa livrée somptueuse, la crécerelle se distingue par un vol stationnaire distinctif, rappelant celui du martin-pêcheur, mais unique parmi les rapaces du continent. Ailes et queue déployées, en «vol du Saint-Esprit», elle plane au vent à la recherche de proies, avec parfois un battement rapide pour ajuster sa position. Au retour de migration, pour se revigorer en vue de la reproduction, elle prisera de petits mammifères et de petits passereaux. Mais en été, elle se nourrit principalement de gros insectes (sauterelles, libellules, papillons) qui sont alors abondants et plus faciles à repérer dans les milieux ouverts où elle préfère se tenir. La crécerelle fréquente volontiers les milieux habités, perchée sur les fils aux abords des champs agricoles, ou survolant les clairières et les grands parcs. En Amérique du Nord, c’est le rapace le plus utilisé en fauconnerie, notamment à l’Aéroport International Montréal-Trudeau, où elle contribue à effrayer les petits passereaux aux abords des pistes.

Le plus élégant de nos faucons a des couleurs d’oiseau exotique. Son dos fauve est rayé de traits sombres, et une bande noire termine sa queue rousse. Chez le mâle (photo ci-haut), les ailes sont bleu ardoise, lisérées d’ébène. – WIKIMEDIA COMMONS

La crécerelle se distingue par un vol stationnaire distinctif, rappelant celui du martin-pêcheur, mais unique parmi les rapaces du continent. Ailes et queue déployées, en «vol du Saint-Esprit», elle plane au vent à la recherche de proies. – WIKIMEDIA COMMONS