Un tambourineur forestier au rythme… cosmique?
Par Michel Aubé, passionné de Biodiversité (17 janvier 2018)
Pour le mâle de la Gélinotte huppée, l’expression «battre de l’aile» ne signifie pas «mal fonctionner» : c’est le mode d’affirmation de son territoire et une composante de sa parade nuptiale. Contrairement aux oiseaux chanteurs du même habitat, le mâle ne tente pas de séduire par son chant, mais par un bruit très particulier qui résonne au printemps dans les forêts mixtes. Il est produit par un battement des ailes qui crée un vacuum et fait entendre un bruit sourd de percussion de plus en plus rapide, audible un demi kilomètre à la ronde.
À vingt semaines environ, le jeune mâle entreprend sa vie adulte en délimitant son territoire. À 2-3 km du lieu de naissance, il trouve comme estrade un tronc d’arbre d’où il claironne sa propriété et tente d’attirer les femelles. Devant les curieuses qui se pointent, il gonfle sa collerette de plumes et parade en dressant sa queue déployée. Il passera le reste de sa vie sans s’éloigner de plus de 200-300 mètres de son estrade.
Les chercheurs ont remarqué que les populations de gélinottes variaient rigoureusement selon un cycle d’une dizaine d’années entre deux sommets, avec un sommet un peu plus élevé que le suivant aux vingt ans. Les facteurs sont encore mal connus, mais il semble que les variations cycliques de température en hiver y soient pour quelque chose, de même que les variations dans les populations de prédateurs. Le phénomène est également observé chez le lièvre et le porc-épic qui fréquentent les mêmes habitats et dont les populations varient à un rythme semblable.
Il est possible que cette régularité découle d’un cycle «cosmique», car on a observé un accroissement significatif du couvert de neige coïncidant avec les pics d’activité solaire. Or, il a été remarqué que les populations de gélinottes sont toujours plus abondantes dans les lieux où le couvert de neige poudreuse est plus épais, car elles ont l’habitude de se réfugier sous la neige en hiver. En y plongeant en vol jusqu’à quelques centimètres sous la surface, elles trouvent ainsi un abri plus chaud qu’à l’extérieur et plus sécuritaire contre les prédateurs.
Après avoir joué sa partition de percussion, le mâle exécute sa danse nuptiale, collerette et queue déployées. – WIKIMEDIA COMMONS
Le plumage de la femelle la camoufle bien parmi les feuilles mortes qui tapissent le sol roux de l’automne. – WIKIMEDIA COMMUNS