Le menuet de la tisserande et du marquis

Par Michel Aubé, passionné de Biodiversité (25 mai 2022)

Avec la canicule du début mai, l’installation des abreuvoirs à colibri a été devancée de quelques jours. Le nectar rutilant est à peine versé dans les petites bouteilles accrochées aux mangeoires, qu’un sifflement flûté se fait retentir dans les hautes ramures. Le naturaliste s’éloigne de plusieurs mètres et observe immobile le flash lumineux venu explorer le breuvage offert.

C’est l’Oriole de Baltimore, qui revient chaque année sur les terres du CINLB au cours de la première semaine de mai. Il a l’allure d’un noble, on dirait un marquis au capuchon noir, vêtu d’un pourpoint orange vif et recouvert d’une fine cape couleur d’ébène. Ses ailes sont lisérées de blanc et deux barres alaires les traversent, orange sous l’épaule et blanche un peu plus bas. La queue est noire, lisérée du même orange fluorescent que sur le croupion.

Le plumage plus discret de la femelle sert de camouflage efficace lorsqu’elle est sur le nid. – WIKIMEDIA COMMONS

Le mâle, dans sa livrée somptueuse, veille près du nid en forme de sac, tissé par la femelle. – WIKIMEDIA COMMONS

La femelle a une allure plus discrète, qui la camouflera mieux au nid. La tête et le haut du dos sont brun olive, et sa poitrine est jaune ambré. Le nid qu’elle tisse avec minutie est une merveille d’artisanat animal. Prenant la forme d’un sac souple, il est fixé aux plus hautes branches d’un orme, d’un érable ou d’un peuplier. Bien caché par les feuilles, il oscille légèrement au vent, tel un hamac sécuritaire. La femelle utilise toutes sortes de fibres, végétales ou animales (herbes, écorces, ficelles, fils de laine, poils ou cheveux) souvent apportées par le mâle et qu’elle entrelace finement.

Celui-ci a d’abord courtisé sa belle en sautillant autour d’elle, tête inclinée et ailes ouvertes, découvrant ainsi le flash de son croupion. Si la femelle en agrée les égards, elle déploie sa queue en éventail, en frétillant des ailes et en émettant un gazouillis flûté. Ce gentil menuet scellera l’union de ces partenaires monogames… ce qui n’empêchera pas toutefois quelques incartades occasionnelles!

L’Oriole de Baltimore affectionne les espaces ouverts plantés de grand feuillus. Il fréquente volontiers les humains et se laisse aisément inviter aux mangeoires, où il raffole du nectar à colibri, de sections d’oranges, de raisins… et aussi d’un peu de gelée de fruits, s’il vous plait! Il peut même se hasarder à y emmener sa nichée en pique-nique. Et ces jeunes reviendront probablement l’année suivante nicher à proximité!