Le boucher masqué qui embroche ses proies

Par Michel Aubé, passionné de Biodiversité

Entre la mi-novembre et la mi-mars, un visiteur singulier fait son apparition dans les clairières enneigées du CINLB et sur les berges glacées du lac Boivin. De couleur gris perle, avec des ailes noires marquées de blanc, la Pie-grièche boréale est un oiseau qui se donne des allures d’oiseau de proie, sans en être véritablement un. Elle appartient en effet à l’ordre des Passériformes, comme les mésanges, les bruants ou les geais.

Elle est presque aussi grande que le Merle d’Amérique. Sa tête est barrée d’un masque et sa longue queue noire lisérée de blanc est arrondie à son extrémité. Mais son bec est recourbé comme celui des rapaces et ses mœurs s’apparentent à ceux des éperviers et des faucons. C’est un oiseau vorace, qui doit ingurgiter environ les deux tiers de son poids en nourriture chaque jour. Il se nourrit principalement de petits mammifères, comme les mulots, les souris ou les musaraignes, mais aussi de petits oiseaux chanteurs, comme les mésanges, les bruants, les sizerins ou les roselins. 

Souvent perché à la cime des arbres, il fonce sur ses proies qu’il poursuit jusque dans les fourrés et leur perce le crâne de son bec. Il tue plus de proies qu’il n’en mange sur le coup, car il s’en fait des réserves qu’il embroche sur des épines ou des barbelés ou qu’il coince dans la fourche d’une branche. Comme les rapaces, il régurgite en petites boulettes les os et les poils qui ont été avalés. Son nom scientifique, Lanius borealis, signifie « le boucher du Nord ».

Malgré qu’elle fasse partie des passereaux, la Pie-grièche boréale prend nettement des allures de petit rapace, tant par son bec recourbé que par son comportement de prédation sur les petits oiseaux et les micromammifères. – WIKIMEDIA COMMONS

L’aire de nidification de la Pie-grièche boréale s’étend du nord du Labrador jusqu’à l’Alaska, entre le 50e et le 70e parallèle, et elle ne fréquente le sud du Québec qu’en hiver, généralement en solitaire. Elle niche en avril-mai dans la toundra et n’a généralement qu’une couvée contenant en moyenne six et sept oisillons. Le mâle courtise la femelle en lui présentant des proies et en lui sifflant un chant mélodieux et complexe, comparable à celui des moqueurs. Il continue de lui apporter régulièrement de la nourriture après l’accouplement et tout au long de la couvaison.