Un escargot à l'ail… nature!
Par Michel Aubé, passionné de Biodiversité (29 septembre 2021)
Les canicules accablantes de l’été s’estompent peu à peu dans notre mémoire, alors que la fraicheur des nuits s’accentue d’une journée à l’autre. L’automne s’installe doucement, en se tissant, feuille à feuille, un large tapis rouge, aux franges mordorées. Sur le sol moelleux, entre les touffes éparses de mousse et le feuillage racorni, un éclat scintille soudain, tel un bijou égaré.
Observé de près, voilà qu’il oscille et remue légèrement, comme à la recherche de son écrin perdu. Une protubérance sinueuse s’étire du joyau perlé qui progresse lentement entre les brindilles. Ce corps est prolongé de deux fines tentacules projetant vers l’avant des yeux insolites. C’est un tout petit escargot, à la spirale plate et étalée, qui arpente et prospecte son univers. Sa taille minuscule n’occuperait même pas la moitié d’une pièce de dix sous. La coquille brunâtre s’enroule sur quatre spires (parfois quatre et demie) et est quasiment translucide, laissant apparaître en transparence le corps bleu nuit du mollusque.
C’est Oxychilus alliarius, un escargot terrestre que les anglophones regroupent parmi les glass snails, les «escargots de verre», en raison de leur coquille à l’aspect cristallin. Alors que la respiration se fait par le moyen de branchies chez les escargots aquatiques, elle se fait par le moyen d’un poumon chez les escargots terrestres. Au gré de l’évolution, cette adaptation a permis à diverses familles de mollusques de s’affranchir du milieu aquatique. L’orifice respiratoire est un pore minuscule situé à la base de la tête, près de la sortie de la coquille.
Le qualificatif de l’espèce en présence, alliarius, signifie «à l’ail». Il évoque l’odeur forte qui se dégage des sécrétions émises lorsque l’animal est perturbé. Originaire d’Europe occidentale et centrale, où les hérissons font des ravages parmi les populations d’escargots, Oxychilus alliarius a pu tirer de cette odeur répulsive une protection salutaire. Sa propagation en Asie, en Océanie et sur le continent américain s’est faite par le biais de l’exportation de plantes ornementales et de produits horticoles.
Les crapauds, les musaraignes, les petits rongeurs et les oiseaux, particulièrement les grives, représentent chez nous les principales menaces à ce petit mollusque. Mais Oxychilus alliarius est lui-même un prédateur invasif et vorace qui peut menacer diverses espèces endémiques, non seulement plusieurs plantes de jardins, mais aussi des invertébrés de plus faible taille, tels des vers de terre, et surtout d’autres petits escargots, dont il élimine la progéniture en se délectant des œufs.
Oxychilus alliarius est un escargot terrestre que les anglophones regroupent parmi les glass snails, les «escargots de verre», en raison de leur coquille à l’aspect cristallin. – WIKIMEDIA COMMONS
La taille minuscule de l’escargot n’occuperait même pas la moitié d’une pièce de dix sous. – PHOTO MICHEL AUBÉ